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Entretien A une semaine de l’ouverture des Jeux olympiques, les expulsions des lieux de vie informels (squats, campements, bidonvilles) s’intensifient en Ile-de-France. Le collectif Le revers de la médaille dénonce un nettoyage social. Entretien avec Antoine de Clerck, son chargé de la coordination.
Le collectif Le revers de la médaille, qui regroupe plus d’une centaine d’associations telles que Médecins du Monde, le Secours catholique ou Utopia 56, s’est constitué en septembre 2023 face aux risques qui pèsent sur les personnes en situation de précarité à l’occasion des Jeux olympiques et paralympiques. Le 30 octobre 2023, pour la première fois, ils avaient alerté sur la situation des plus vulnérables à l’aide d’une projection lumineuse sur la façade du bâtiment du Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques. Depuis, ils multiplient les actions et documentent la situation des personnes à la rue. Entretien avec Antoine de Clerck, chargé de la coordination au sein du collectif.
A moins d’une semaine des Jeux olympiques, quelle est la situation des sans-domicile fixe et des migrants en Ile-de-France ?
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Antoine de Clerck A l’instar des autres villes étrangères qui ont accueilli les Jeux olympiques, Paris fait du nettoyage social. Cette semaine, on a assisté au sprint final : tous les campements ont été évacués, ceux de Saint-Denis, de Saint-Ouen, de Pantin ou encore ceux installés sur les berges de la Seine. Les Jeux olympiques entraînent une pression médiatique, économique, politique et touristique sur la ville. Quoi qu’on en dise, c’est un enjeu majeur de transformer Paris en carte postale pour un événement qui sert de vitrine puisqu’il attire l’attention du monde entier, plus que n’importe quelle autre compétition. L’objectif de l’Etat est donc de cacher la misère en faisant disparaître toutes les personnes jugées indésirables, les plus pauvres, les migrants, les travailleurs du sexe… Des actions bien éloignées de la promesse d’organiser des Jeux inclusifs. Ces opérations ont toujours existé mais depuis la période de préparation des JO, elles se sont intensifiées, bien que la préfecture de la région et la police continuent de nier le lien entre l’événement et ces évacuations. Au total, plus de 12 500 sans-abri ont été expulsés en Ile-de-France entre 2023 et 2024, et dans seulement 35,3 % des cas, une mise à l’abri a été proposée.
Que se passe-t-il après qu’un campement a été évacué ?
Le principal dispositif proposé est celui des SAS Régionaux d’accueil, qui consiste à délocaliser les personnes à la rue à Paris dans une dizaine de villes en France. A chaque évacuation, un bus arrive et emmène ces personnes tantôt à Orléans, tantôt à Strasbourg, par exemple. Les expulsés sont hébergés trois semaines dans un hôtel géré par une association. Un diagnostic de leur situation administrative est effectué. Parmi ces personnes déplacées, 40 % sont des demandeurs d’asile et 60 % des réfugiés ou des personnes avec un titre de séjour. A la fin de ces trois semaines, les demandeurs d’asile sont relogés le temps de faire leurs démarches, pendant quelques semaines ou quelques mois. Les autres personnes, qui sont en situation régulière, relèvent de l’hébergement d’urgence. Elles doivent alors appeler le 115, qui est saturé partout en France. La plupart d’entre elles se retrouvent donc à la rue au bout de trois semaines mais, cette fois, dans une région qu’elles ne connaissent pas.
Quid des enfants ?
Pour eux, c’est une rupture dans la scolarisation, surtout quand l’expulsion de leur lieu de vie se fait en plein milieu de l’année scolaire. Certes, ils sont à nouveau scolarisés dans la ville où ils ont été déplacés mais rescolariser un enfant prend du temps, d’autant plus qu’il va être hébergé trois semaines, par exemple, à Marseille, et ensuite envoyé dans un hôtel pendant un mois à Avignon, puis se retrouver à la rue ou encore dans une autre ville, dans la même région, à Nîmes peut-être. C’est extrêmement instable et les enfants perdent souvent l’année scolaire en cours.
La préfecture réfute le terme « nettoyage social » et met en avant le fait que 140 sans-abri ont été relogés dans des hébergements pérennes dans Paris…
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C’est une bonne chose que des sans-abri soient ainsi relogés grâce aux JO, mais c’est une goutte d’eau puisqu’on comptait encore 4 000 personnes à la rue en juillet dans Paris intra-muros.
La préfecture affirme que les évacuations n’ont pas de rapport avec les épreuves des Jeux olympiques. Comment votre collectif est-il arrivé à la conclusion inverse ?
Au printemps 2023, en Seine-Saint-Denis, une série de plus de 4 000 expulsions – sans proposition alternative de relogement – nous a mis la puce à l’oreille. Lorsque nous avons contacté la préfecture pour la première fois à ce sujet, ils ont affirmé qu’il n’y avait aucun lien entre les Jeux olympiques et ces opérations, et ils maintiennent ce discours encore aujourd’hui. Nous avons donc regardé ce qu’il s’était passé dans les autres pays lors d’éditions précédentes. A Pékin, plus de 1 million de personnes avaient été évacuées pour faire place aux Jeux olympiques et à Rio, 77 000. Nous avons aussi échangé avec des organisations qui avaient suivi ces sujets à l’étranger. Des équipes de Vancouver, qui avait accueilli les Jeux olympiques d’hiver en 2010, sont venues à Paris pour nous aider à bien comprendre comment cela s’est organisé. En France, l’Observatoire des expulsions de lieux de vie informels, qui regroupe les associations qui travaillent sur le terrain, documente la situation. Cette année, les expulsions ont augmenté de 38 % par rapport à la période 2021-2022 et trois fois plus de mineurs sont concernés.
Quels sont les autres changements dans la façon dont ces expulsions sont menées ?
Au-delà du nombre de personnes, nous avons également constaté que ces opérations étaient de plus en plus fréquentes. Avant, on pouvait expulser des campements de 250, 300 personnes, aujourd’hui, dès qu’il y a plus de 10 personnes, elles sont évacuées. On observe aussi une localisation géographique des évacuations très nette, principalement sur les sites olympiques et les autres zones de festivité. Il y a également une modification substantielle dans les justifications d’expulsion : pour y procéder, il faut soit une décision de justice, soit un arrêté municipal ou préfectoral. Depuis un an, on constate un recours quasi unique aux arrêtés. Contrairement aux décisions de justice qui prennent plusieurs semaines, ils peuvent être appliqués dans les 24 à 48 heures, ce qui rend la contestation auprès du tribunal administratif compliquée puisque l’évacuation a déjà eu lieu et que les personnes sont dispersées et les témoins, difficiles à trouver. Les craintes des associations se sont donc révélées justes.
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Qu’attendez-vous de l’Etat et des organisateurs à moins d’une semaine de l’ouverture des Jeux olympiques ?
Malheureusement, plus grand-chose, tous les campements ont déjà été évacués. On ressent de l’amertume parce qu’on avait la possibilité il y a un an que les choses se passent différemment. Notre première action a eu lieu en octobre 2023 et depuis rien n’a été fait. Pourtant, nous nous sommes concertés une quarantaine de fois avec toutes les institutions possibles et imaginables : le comité olympique, la préfecture de région, la ville de Paris pratiquement tous les 15 jours, la région Ile-de-France, le département de Seine-Saint-Denis, les maires d’arrondissement, les ministères… Nous leur avons dit que nous n’étions absolument pas anti-JO, mais qu’il n’y avait pas de raison qu’ils aient des conséquences sur les plus vulnérables. Depuis un an, ils se renvoient la balle de la responsabilité et finalement ils ont fait ce qu’ils voulaient.
Comment envisagez-vous les prochaines semaines ?
Notre collectif va continuer les actions, sans dégradation, toujours festives et colorées, dans le but d’apporter de la visibilité à ce qu’il se passe dans l’espace public. Le 25 juillet, à la veille de la cérémonie des Jeux olympiques, nous serons place de la République avec toutes les associations qui ont dénoncé les impacts sociaux, écologiques ou la vidéosurveillance algorithmique. Le 4 août, nous ferons un grand collage de 200 m2 sur le sol avec les portraits de SDF expulsés et un DJ set au Petit Bain, un espace culturel flottant sur la Seine. Nous travaillons par ailleurs déjà sur les prochains Jeux olympiques à Los Angeles, où les sans-domicile fixe sont dix fois plus nombreux qu’à Paris, en espérant éviter une catastrophe. Et sur ceux d’hiver dans les Alpes, en 2030 aussi, qui cette fois sont désastreux sur le plan écologique.
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