L’une des pionnières de la presse parlementaire québécoise, Gisèle Gallichan, a été emportée par une hémorragie cérébrale foudroyante lundi à sa résidence de Sainte-Pétronille, à l’île d’Orléans. Elle était âgée de 79 ans.

Originaire du quartier populaire de Limoilou, à Québec, la fille de l’ancien chroniqueur judiciaire Lionel Gallichan envisage d’abord une carrière au théâtre avant de se tourner vers la radio. En 1967, elle fait son entrée à la Tribune de la presse du parlement de Québec pour la station CJLR, à l’âge de 21 ans seulement.

« Je me rendais compte que j’étais la première femme avec des micros et des fils autour du cou », racontera Gisèle Gallichan dans un entretien. Six ans après le passage de la première correspondante parlementaire, Evelyn Dumas, les femmes se comptent encore sur les doigts d’une main au sommet de la colline en 1967.

L’arrivée de cette grande blonde dans ce boys’ club enfumé où l’alcool coulait à flots se déroule bien, somme toute. « Elle disait qu’elle n’avait pas été discriminée, sauf par quelques “vieilles barbes” », relate son frère Gilles Gallichan en entrevue au Devoir. « Il faut dire que c’était une fille conviviale, elle s’est rapidement fait des amis. »

Son contact avec la politique démarre sur des chapeaux de roues avec la couverture de la tournée spectaculaire du général de Gaulle à l’été 1967. La même année, Gisèle Gallichan assiste au départ fracassant de René Lévesque du Parti libéral du Québec lors du célèbre congrès du Château Frontenac.

En 1969, la jeune journaliste est recrutée comme attachée de presse par le ministre de l’Immigration de l’Union nationale, Mario Beaulieu. « C’était une fonction nouvelle à l’époque, rappelle Gilles Gallichan. Je lui ai déjà dit “si tu écris tes mémoires, il faut absolument que tu racontes c’était quoi, parce que cette fonction a bien changé avec le temps !” ».

Gisèle Gallichan conserve son poste en dépit de la victoire des libéraux de Robert Bourassa, en avril 1970. Elle devient ainsi l’attachée du ministre Pierre Laporte, un autre ancien journaliste. Leur association se termine abruptement dans les mois qui suivent avec l’enlèvement du ministre par le Front de libération du Québec. « Au cabinet, ils n’étaient pas informés de ce qui se passait à Montréal », se remémore Gilles Gallichan en parlant de cette période trouble.

La plus longue carrière de correspondante

Après ce bref séjour en politique, Gisèle Gallichan retourne à la Tribune de la presse en 1971 pour Radio-Mutuel. Elle va arpenter les couloirs de l’hôtel du Parlement jusqu’en 1996, après avoir couvert les moments phares de la politique québécoise pour Radio-Canada, TVA et Radio-Québec.

La journaliste a cumulé le plus grand nombre d’années de service sur la Colline parlementaire, avec ses 25 ans, comme le souligne l’historien Jocelyn Saint-Pierre dans son ouvrage consacré à la Tribune de la presse.

« C’était une femme extraordinaire », a commenté la ministre québécoise de l’Enseignement supérieur, Martine Biron, dans les couloirs de l’hôtel du Parlement. « Elle était posée, réfléchie, elle nous a ouvert la voie », a précisé la politicienne, qui est elle-même une ancienne correspondante parlementaire.

Retraitée active, Gisèle Gallichan aura conservé la forme jusqu’à la toute fin, comme le souligne son frère Gilles. « Elle reconnaissait qu’elle avait sans le savoir fait avancer la cause des femmes au sein du journalisme parlementaire. »