Dans la tête de catholiques d’extrême droite

Dans la tête de catholiques d’extrême droite

Ils sont catholiques et votent pour l’extrême droite. Dans l’Aisne, département où le Rassemblement national a réalisé un score historiquement haut (50,64 %), Marie-Thérèse, 74 ans, sort de la messe avec sa fille et sa petite-fille, en ce dimanche 16 juin, dans l’église de Chauny. Ancienne animatrice en pastorale, qui a élevé seule ses six enfants, Marie-Thérèse confie avoir voté aux élections européennes du 9 juin pour la liste RN menée par Jordan Bardella. Elle « l’a senti ».

« Bardella, quand il parle, on a l’impression qu’il vous écoute », renchérit sa fille. Le RN, reprend Marie-Thérèse, « on n’a jamais essayé ». Pour elle, être catholique, « ça ne change rien » : « Je ne vais pas regarder dans la Bible ce qu’il faut faire en politique. Ce que je retiens de l’Évangile, c’est d’aimer. »

Comme elle, les catholiques pratiquants, même les plus réguliers dans des proportions moindres, sont de plus en plus nombreux à voter pour l’extrême droite, selon une étude Ifop pour La Croix à l’occasion des élections européennes. Mais comment l’expliquer, alors que d’autres catholiques s’indignent et pointent une incompatibilité au nom des valeurs de l’Évangile à voter pour l’extrême droite, qui porte notamment la « préférence nationale » ?

Défense des « valeurs chrétiennes »

Plus encore que Marie-Thérèse, certains défendent résolument une forme de continuité entre leur foi et leur vote pour le RN ou Reconquête !, et ce au-delà des cercles de l’extrême droite catholique traditionnelle. Le vote d’extrême droite attire aujourd’hui plus largement des catholiques qui défendent ce qu’ils pensent être l’identité chrétienne de la France, craignent l’immigration et le « libéralisme culturel ».

À l’image de Jean-Baptiste (1), 21 ans, qui déplore le déclin des valeurs traditionnelles, qu’il identifie aux valeurs chrétiennes. Étudiant dans une prestigieuse école de commerce, il s’est abreuvé des classiques de la philosophie – Aristote, saint Augustin, saint Thomas – pour chercher « ce qui donne sens à notre existence ». Il en retire que, depuis que « les valeurs proposées par l’Église sont remises en cause », l’humanité connaît « un déclin anthropologique profond ». Un constat qui se cristallise, selon lui, sur la bioéthique : « En légalisant l’avortement, et aujourd’hui avec la loi sur l’aide à mourir, on lève l’interdit de tuer qui nous a permis de vivre ensemble pendant des siècles. »

Dénonçant une société matérialiste et sans âme, le jeune homme regrette l’abandon d’une forme de tradition. À commencer par l’amour pour la patrie : « Aujourd’hui, on ne fait que se plaindre de nos erreurs historiques alors qu’on a une histoire magnifique, dans ses prouesses et ses faiblesses. »

Au lendemain de l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale, Jean-Baptiste s’est indigné devant des images d’une manifestation contre l’extrême droite à Nantes, où un drapeau français est arraché d’une fenêtre. « Je me suis dit qu’on avait échoué à transmettre les valeurs françaises et l’amour de ce pays », confie-t-il. En votant à l’extrême droite, il a l’impression de « défendre l’identité de la France et ses racines chrétiennes » qu’il sent « profondément en danger ».

Refus d’une société multiculturelle

Mais d’où viendrait ce « danger » ? De ce qu’il appelle le « progressisme déconstructiviste » et de l’immigration. « Elle met en danger notre civilisation et notre religion : les gens qui arrivent sont issus d’une religion qui est tout autre, et la cohabitation risque d’être difficile pour les chrétiens », estime-t-il, visant directement l’islam. Prenant ses distances avec la vision du pape François qui promouvait, par exemple, à Marseille la « convivialité des différences », Jean-Baptiste assume résolument ne pas croire en la possibilité d’une société multiculturelle.

« La réalité des nations, c’est d’avoir une culture très précise », soutient-il, allant jusqu’à dire que « deux cultures sur un même sol, cela peut mener à la guerre civile ». Et pour lui, insécurité et immigration vont de pair. Il cite comme une évidence les émeutes de juin 2023 qui pourtant concernait essentiellement des Français. « Ils ont une carte d’identité, mais est-ce qu’ils se sentent français, est-ce qu’ils aiment leur pays ? », interroge-t-il.

Thibault, 21 ans, ancien étudiant d’une université catholique, aujourd’hui en master de relations internationales à Paris, fait, lui aussi, un lien entre sa conception de la nation, qui se doit d’être culturellement homogène, et sa foi catholique : « Le commandement “Tu honoreras ton père et ta mère” est central : il s’agit de conserver ce que nous ont transmis nos parents, nos grands-parents. Il faut protéger sa terre. » Contre le danger supposé que ferait peser l’immigration, selon lui, même s’il considère qu’il faut accueillir les « réfugiés de guerre ».

« La charité, c’est aider la personne en bas de chez soi »

Certains assument des positions encore plus radicales. Pour Adrien (1), 26 ans, catholique d’origine portugaise, le danger, c’est « le grand métissage ». Citant la théorie complotiste antisémite du « plan Kalergi », le jeune homme, cadre dans l’industrie, qui a grandi dans un quartier populaire parisien, soutient que « les élites mondialistes » ont un plan consistant « à mélanger les populations pour leur enlever leurs racines ».

Ayant grandi avec des musulmans, Adrien n’a pourtant pas de problème particulier avec l’islam, dont il partage certaines valeurs : « Je me sens plus proche des musulmans sur certains principes comme la famille, la défense de la vie ou le sens du sacré, que des gauchistes anticléricaux. » Attaché à la justice sociale, il apprécie le RN qui est « à gauche sur l’économie et à droite sur l’immigration et la laïcité ».

Mais comment ces catholiques d’extrême droite peuvent-ils concilier le rejet de l’immigration avec l’Évangile appelant notamment à accueillir l’étranger ? Perçoivent-ils une tension ? « On entend souvent qu’au nom de la charité, on devrait accueillir. Et je peux le comprendre !, pose Jean-Baptiste. Mais il ne faut pas dévoyer le fait que la charité est toujours personnelle et jamais politique : la charité, c’est aider la personne en bas de chez soi. Cette vertu doit toujours être mise en balance avec le bien commun. » Un bien commun entendu pour lui comme celui de la nation, qui serait mise en péril par l’arrivée d’étrangers. « Avec l’immigration, on parle de masses, insiste Jean-Baptiste. Ce n’est pas cinq personnes qu’on va accueillir dans un esprit de charité, en prenant soin d’eux. »

« Le prochain, c’est celui qui est proche », renchérit Adrien, qui estime aussi que la charité se vit uniquement dans les situations interpersonnelles et pense qu’« aimer quelqu’un à 10 000 km, ça n’existe pas » : « L’amour, c’est quelque chose de concret qui s’adresse à une personne concrète. » Pour lui, limiter l’immigration, c’est aussi défendre les immigrés : « Ces personnes vont devenir livreurs Uber, être payées au lance-pierre. Je pense que ce n’est souhaitable pour personne. »

Pour eux, la gauche fait figure de repoussoir. « Je veux limiter l’emprise de ceux qui sont contre les catholiques », lance ainsi une électrice RN, la cinquantaine, à la sortie de la cathédrale gothique de Laon (Aisne), samedi 22 juin. Elle accuse la « gauche » de vouloir « fermer les écoles catholiques ». Pour cette ancienne acheteuse, il ne fait aucun doute que « la religion a toujours été menacée par la gauche, comme à Cuba ou en URSS ».

Dans le sillage des combats contre le « mariage pour tous », la question des personnes LGBT agit aussi comme un marqueur du vote d’extrême droite catholique. « Macron et Les Républicains sont beaucoup trop progressistes sur ces questions, tranche Thibault. Je pense qu’on peut être homosexuel ou transgenre, mais je n’aime pas qu’on en fasse la promotion, parce que c’est ce qui fait disparaître la famille », juge celui qui pense que « ces modèles familiaux ne correspondent pas à ce qui est souhaitable ». Une vision profondément contestataire des évolutions de la société qui est l’un des ressorts principaux du vote catholique d’extrême droite.

(1) Les prénoms ont été modifiés.

sainte-marie-orleans.org vous produit ce texte qui aborde le thème « Paroisse Sainte-Marie d’Orléans ». Le but de sainte-marie-orleans.org étant de rassembler en ligne des données sur le sujet de Paroisse Sainte-Marie d’Orléans puis les diffuser en essayant de répondre du mieux possible aux interrogations que tout le monde se pose. Cet article se veut reconstitué de la façon la plus correcte que possible. Si jamais vous projetez d’apporter quelques précisions autour du sujet « Paroisse Sainte-Marie d’Orléans », vous avez la possibilité de d’échanger avec notre rédaction. Dans les prochaines heures on rendra accessibles à tout le monde d’autres annonces autour du sujet « Paroisse Sainte-Marie d’Orléans ». Alors, consultez régulièrement notre blog.